22 Juillet 2011
Lucian Freud par lui-même
Qu’on-t-ils tous à mourir, c’est une épidémie ? Non, les bons peintres devraient éviter ce genre de choses, qui finalement embète tout le monde.
Il avait été l’ami de Francis Bacon, pourtant leur peinture ne se ressemblait pas. On se souvient des portraits qu’ils firent l’un de l’autre.
Voici l’article que je lui avais consacré:
Fils d’un architecte berlinois et petit-fils du célèbre Sigmund, Lucian voit le jour à Berlin le 8 décembre 1922. Il naît sous le signe du sagittaire, et du chien selon l’horoscope chinois.
En 1933, son père quitte Berlin pour fuir le nazisme et s’établit en Angleterre, à Londres.
Lucian ne quittera jamais Londres. Après ses études classiques, il s’inscrit au Central Scool of Arts and Crafts de Londres.
En 1939, il obtient la nationalité britannique. Jusqu’en 1941, il continue à suivre des cours de peinture dans différentes écoles.
1941, c’est la guerre, il est mobilisé dans la marine. Après trois mois (sans doute avait-il le mal de mer…), il est rendu à la vie civile. Jusqu’en 1943 il continuera à étudier l’art en général et la peinture en particulier.
Sa première expo a lieu en 1944, à Londres, bien entendu.
En 1948, il se marie avec Kitty Garman.
En 1952 Il se remarie avec Caroline Blackwood.(faut-il préciserqu’il avait divorcé entre temps).
Freud obtient quelques succès en Angleterre où il commence à être connu ; son « amitié » avec Francis Bacon contribuera pas mal à sa notoriété, de même que les nombreux portraits que celui-là fera de lui. Il faudra attendre 1974 (Lucian a 52 ans) pour qu’une grande exposition lui soit enfin consacrée : Rétrospective de son œuvre à la Hayward Gallery de Londres
Francis Bacon par Lucian Freud
Lucian Freud est encore très peu connu hors du Royaume Uni, et particulièrement en France, où même encore aujourd’hui il est relativement méconnu, hormis quelques rares initiés.
Suite à la rétrospective de Londres, plusieurs grandes expos lui sont consacrées, en particulier en France à la Fondation Maeght à Saint-Paul-de-Vence.
Comme vous allez pouvoir le constater grâce aux images jointes, Freud est un excellent portraitiste.
Elisabeth II par Lucian Freud
En l’an 2000 lui vient l’idée saugrenue de faire le portrait de la reine d’Angleterre. Après avoir fait ce qu’il fallait pour ça, il obtient l’autorisation. Bien entendu, il offrira ce portrait à la reine,pour son jubilé, où voudriez-vous qu’elle trouve des sous pour le payer ? Faut pas déconner…
Freud oblige ses modèles (j’ai failli écrire ses patients) à de très nombreuses séances de pose, on dit que pour faire le portrait de sa mère il aura fallu mille séances. Le lieu où devait se rendre Elisabeth ne pouvait en aucun cas être l’atelier de Freud dont les murs étaient barbouillés de peinture, quantité de chiffons jonchaient le sol, pour tout éclairage une ampoule pendait du plafond, comme dans les peintures de Bacon, de plus l’accès se faisait par un vieil escalier branlant.
Il fut décidé après de nombreuses discussions que cela se passerait dans un des palais de la reine. Les séances de pose durèrent de mai 2000 à décembre 2001. Freud avait demandé à la reine de poser avec sa couronne, de la même façon qu’elle apparaissait sur les timbres postes. Contrairement à ce que l’on pouvait imaginer, Freud ne fit pas une grande toile où il aurait représenté la reine sur son trône et dans toute sa splendeur. Il choisit un petit format sur lequel la tête vue de face grandeur nature occupait toute la surface du tableau. Comme à son habitude Freud utilisa ses couleurs habituelles (cadavériques) et ne fit aucun cadeau à la reine, alors même qu’il lui vouait un grand respect. Bien entendu la peinture fit scandale en Grande-Bretagne. La reine n’en fit pas pour autant don à une œuvre de charité !
Pour moi la peinture de Freud est le domaine de l’ambiguïté, certains vont lui trouver des accointances avec le surréalisme, d’autres avec l’expressionnisme allemand, même dans certains cas avec l’hyperréalisme.
Ce qui frappe d’abord à la vue d’une de ses œuvres c’est souvent la composition, les personnages sont pris sous des angles très particuliers.
Lucian Freud par lui-même
Mais j’aimerais insister sur la palette, ou si vous préférez les couleurs utilisées par Freud. J’ai parlé plus haut de couleurs cadavériques, il s’agit bien de ça. Chez son ami Bacon c’est le « côté viande » qui ressort, chez lui c’est le « côté cadavre », l’un n’utilise que des couleurs froides : vert de gris, couleurs glauques, chez Bacon ce sont des couleurs chaudes : rouges, oranges etc…
Et puisque nous en sommes à comparer leurs peintures, comme je l’ai écrit dans un autre article sur Bacon, bien qu’elles semblent complètement à l’opposé, il est difficile de ne pas faire le rapprochement. Tous deux sont des provocateurs, leur peinture peut difficilement vous laisser indifférents. Les sujets parlent d’eux-mêmes, souvent dénudés, presque toujours dans des attitudes provocantes. Freud choisit ses modèles et les femmes de Renoir ou de Rubens n’ont rien à lui envier.
Pour moi Freud est avant tout un excellent portraitiste, sauf avec Elisabeth, mais là il ne faut pas demander l’impossible. Freud n’a jamais cherché à flatter son modèle, voir le portrait qu’il fait de David Hockney.
Il y a une chose qui n’apparaît pas forcément à l’œil d’un profane c’est la qualité de la touche, si vous préférez la façon de poser la peinture sur la toile : chez Freud il y a une très grande originalité, regardez en détail ses portraits.
Francis Bacon par Lucian Freud
A partir des années soixante Freud profitera des leçons de son ami Francis Bacon, il travaillera avec de plus grosses brosses (pinceaux), facilitant ainsi les « accidents ». À compter de ce moment la matière gagnera encore en qualité.
L'atelier de Freud
C’est vrai que les personnages peints par Freud semblent tous des êtres dans l’attente de la mort, on a envie d’appeler le Samu : « il y a un noyé sur le mur, venez vite ». Sans doute ses peintures nous interpellent-elles à ce sujet.
De toute façon qu’on aime ou pas il est difficile de rester indifférent à cette œuvre.
Lien portraits de Lucian Freud par Francis Bacon
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